Comment déterminer son régime matrimonial dans une situation maritale internationale ?

Vous vous êtes mariés à l’étranger, vous avez épousé une personne de nationalité étrangère, vous avez vécu dans un pays étranger durant plusieurs années, vous possédez des biens à l’étranger, et vous vous demandez quel est votre régime matrimonial ?

Aude Lelouvier

Voici la démarche à suivre !

En amont, il est nécessaire de déterminer la loi applicable à votre régime matrimonial, c’est-à-dire la loi française ou la loi étrangère, puis, selon la loi compétente, de rechercher quel est le régime matrimonial qui s’applique à défaut de contrat de mariage.

Pour déterminer la loi applicable à votre contrat de mariage, la procédure à suivre dépend de l’année à laquelle vous avez conclu votre mariage ! 

Mariage conclus avant le 1er septembre 1992 :

Ainsi, si votre mariage a eu lieu avant le 1er septembre 1992, il faut appliquer les règles du droit international privé national puisqu’avant cette date aucun texte international ne régissait la matière.

Droit international privé français

En droit international privé français, la règle de conflit applicable aux régimes matrimoniaux a été établie par la jurisprudence de la Cour de cassation. Ainsi, la loi applicable au régime matrimonial des époux résulte de l’autonomie de la volonté. En d’autres termes, la loi applicable est déterminée selon le choix qui a été fait par les époux, et ce choix peut être exprès ou tacite.

Toutefois, il est fréquent que les époux n’aient pas choisi la loi applicable à leur régime matrimonial avant la célébration du mariage. Par conséquent, la Cour de cassation impose alors de rechercher, d’après les faits et circonstances le statut matrimonial que les époux ont implicitement eu la volonté commune d’adopter le jour de leur mariage.

VOLONTE COMMUNE DES EPOUX

Pour déterminer la volonté des époux, différents éléments mêmes postérieurs au mariage, doivent être examinés pour éclairer leur volonté. Toutefois, la Cour de cassation reconnaît une place prépondérante à l’indice fondé sur le premier domicile matrimonial des époux et considère que la loi applicable au régime matrimonial d’époux mariés avant 1992 est déterminée principalement en considération de la fixation de leur premier domicile matrimonial.

Néanmoins, elle a précisé qu’il s’agissait du lieu où les époux entendent fixer et fixent effectivement de manière stable et durable le siège de leurs intérêts pécuniaires après le mariage. C’est pourquoi, la pratique notariale a tendance à considérer que l’établissement des époux dans un État pendant plus de deux ans constitue un premier domicile matrimonial.

Mariages conclus entre le 1er septembre 1992 et le 29 janvier 2019 :

Lorsque les époux se sont mariés entre le 1er septembre 1992 et le 29 janvier 2019, de nouvelles règles s’appliquent. En effet, le 1er septembre 1992, un premier texte international est entré en vigueur : la Convention de La Haye du 14 mars 1978 sur la loi applicable aux régimes matrimoniaux.

CONVENTION DE LA HAYE SUR LA LOI APPLICABLE AUX REGIMES MATRIMONIAUX

En application de ce texte, le principe retenu, pour déterminer la loi applicable aux régimes matrimoniaux, est celui de l’autonomie de la volonté. Les époux ont donc la possibilité d’opérer un choix de loi avant le mariage conformément à l’article 3 du texte.

Une nouvelle fois, une règle subsidiaire a vocation à s’appliquer en l’absence de choix de lois. Ainsi, l’article 4 retient qu’à défaut de choix de loi, la loi applicable au régime matrimonial des époux est la loi de l’État sur le territoire duquel ils ont fixé leur première résidence habituelle après le mariage.

Système dérogatoire

Néanmoins, ce même article prévoit un système dérogatoire spécifique. Ce texte retient que le régime matrimonial est soumis à la loi nationale commune des époux si les règles de droit international privé de l’État de nationalité commune des époux et celles de l’État où ils ont fixé leur première résidence habituelle retiennent comme rattachement la loi nationale commune des époux en matière de régimes matrimoniaux.

En outre, si ces conditions sont remplies, il faut également que l’État de nationalité commune, ainsi que l’État de première résidence habituelle ne soit pas partie à la Convention.

MUTABILITE AUTOMATIQUE DE LA LOI APPLICABLE

Attention, la vigilance doit rester de mise !

Une fois la loi applicable déterminée sur le fondement de l’article 4, il faut vérifier que la loi initialement compétente n’a pas changé automatiquement par le jeu de la mutabilité automatique…

En effet, il résulte de l’article 7 de la Convention que lorsque les époux n’ont pas opéré de choix de lois et qu’ils changé de résidence habituelle, la loi applicable devient automatiquement cette de la résidence habituelle si :

  • Leur résidence habituelle coïncide avec leur nationalité commune ou,
  • Si leur nouvelle résidence habituelle a duré plus de dix ans ou,
  • Si les époux sont soumis à leur loi nationale commune en raison de l’absence de résidence habituelle commune sur le territoire d’un État.

Ce n’est qu’une fois tout ce raisonnement effectué que vous pourrez alors savoir quelle est la loi applicable à votre régime matrimonial ! Mieux vaut être aidé d’une personne aguerrie en la matière.

Mariages conclus à compter du 29 janvier 2019 :

Enfin, un dernier texte vient encadrer la recherche de la loi applicable en matière de régimes matrimoniaux, et il s’agit cette fois-ci d’un récent Règlement européen : le Règlement (UE) n°2016/1103 mettant en œuvre une coopération renforcée dans le domaine de la compétence, de la loi applicable, de la reconnaissance et de l’exécution des décisions en matière de régimes matrimoniaux.

REGLEMENT REGIMES MATRIMONIAUX

Ce Règlement prend le relais de la Convention La Haye et s’applique donc aux mariages contractés à compter du 29 janvier 2019.

Dans une logique similaire aux règles applicables à la matière, le Règlement en son article 22, permet aux époux ou futurs époux de choisir la loi applicable à leur régime matrimonial pour autant qu’il s’agisse de :

  • La loi de l’État dans lequel au moins l’un des époux ou futurs époux a sa résidence habituelle au moment de la conclusion de la convention ou ;
  • La loi d’un État dont l’un des époux ou futurs époux a la nationalité au moment de la conclusion de la convention.

Bien entendu, et une nouvelle fois, si les époux n’ont pas opéré de choix de loi, le Règlement retient en son article 26 que la loi applicable au régime matrimonial est la loi de l’État :

  • De la première résidence habituelle commune des époux après la célébration du mariage ou, à défaut ;
  • De la nationalité commune des époux au moment de la célébration du mariage ou, à défaut ;
  • Avec lequel les époux ont ensemble les liens les plus étroits au moment de la célébration du mariage compte tenu de toutes les circonstances.

INTERVENTION D’UN AVOCAT SPECIALISE EN DROIT INTERNATIONAL PRIVE

Ainsi, le régime prévu par le Règlement européen s’avère moins complexe que celui retenu par la Convention de La Haye. Toutefois, on ne peut que conseiller aux justiciables de se diriger vers un avocat spécialiste de la matière afin que celui-ci procède à la recherche de la loi applicable, puis dans l’hypothèse où il s’agirait du droit étranger, à la recherche du régime matrimonial applicable au regard du droit étranger.

De plus, il est d’autant plus pertinent de se diriger vers un avocat spécialisé dans la mesure où  en faveur de la loi qui correspond à vos souhaits ; et ce d’autant plus que cette possibilité est admise tant par la Convention de La Haye que par le Règlement européen « régimes matrimoniaux ».


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